Portrait

Arizona Junior, from Nissa

À l'heure du crépuscule, quand il devient nécessaire d'enfiler une "petite laine" malgré la douceur de l'automne niçois, Jean-Baptiste Quirino décroche son téléphone en short et tee-shirt, un donut devant lui et sa piscine en ligne de mire. Expatrié depuis 2007, ce jeune trentenaire vit son « rêve américain » à Phoenix, en Arizona. Ce qui ne l’empêche pas de garder les pieds et le coeur enracinés à 9 500 km de là : fou du Gym, "JBQ" continue de vivre à l’heure de l’OGC Nice. Réveils dans la nuit pour regarder les matchs et prosélytisme pro-Niçois auprès de ses nouveaux compatriotes constituent les règles de vie de ce biologiste, qui suit fièrement les traces de « son » ancêtre : « Marcos de Niza », le premier pionnier de Phoenix.

Un mail, deux-trois messages WhatsApp et le contact était noué. Renoué même. Rendez-vous lundi 11 octobre, à 19h. Le numéro commence par + 1(480), et il nous transporte dans le « Nouveau Monde », là où Jean-Baptiste s’est installé un peu par hasard. « Après le lycée, j'ai fait une année sabbatique. Ça m’a tellement plu que je ne suis jamais revenu, à part pour les vacances ». « Même si ce n’est plus comme avant, le fameux rêve américain, ici il y a une multitude d’opportunités. Et si tu bosses, tu as des chances de réussir ». Épanoui humainement et professionnellement, ce jeune marié n’a pas tiré de trait sur sa vie d’avant. « Le Ray, les déplacements à Monaco en train avec avec mes potes Alain, Yoan, Alberto… Tu ne peux pas savoir comme ça me manque », évoque, nostalgique celui qui ne ratait jamais un match de Nice. « Mon papa (Pierre), tenait le resto de Coco Beach à l’époque et ne pouvait venir que rarement aux matchs. Dès que le Gym marquait je l’appelais pour le tenir au courant. Par contre, quand on prenait un but, je m’abstenais ».

« Je mets le réveil à 4h du mat... »  

« Les rôles se sont inversés, aujourd'hui c’est moi qui galère pendant les matchs », sourit celui qui est obligé de recourir à quelques « astuces » pour suivre les rencontres. « Il n’y a pas de diffuseur de la L1 chez moi, et en plus les services sont géo-bloqués. Je me débrouille comme je peux. Et quand je n’y arrive pas, j’écoute la radio ou je regarde les résumés et les réseaux sociaux : Instagram, le Zap’Gym, je n’en rate pas une miette. Ah, vous commentez les matchs en direct maintenant sur Facebook ? Je vais regarder, je sens que ça peut me plaire ! » « Le pire, en fait, c’est le décalage horaire. Quand on joue à 21h, c’est parfait pour moi, je me fais mon "petit-déj-foot". Par contre, quand on joue à 13h, il est 4h du mat’ chez moi… Je mets le réveil, mais ce n’est pas facile. Autant te dire que la programmation des matchs, je la scrute avec attention ».

« Ma femme est fan de Dario »

Parce qu’une passion n’est belle que si elle est partagée, celui qui a grandi sur les collines niçoises mène campagne auprès de ses nouveaux compatriotes. En démarrant par le cercle familial. « Ma femme est convertie. Elle est devenue fan de Dario (Cvitanich). Et la seule fois où je l’ai emmenée à l’Allianz, il a claqué un doublé (contre Toulouse, victoire 3-2 avec également un but de Bosetti). Et quand on aura des petits, la question ne se posera même pas ». 

Mais sa « mission » ne s’arrête pas là : « J’achète des maillots que j’offre à mes amis. J’ai une copine, Kiawna Mounts, qui jouait en première division universitaire. Je lui avais donné un maillot du Gym et elle le portait quand elle jouait à Grambling (Louisiane). J’ai toujours mon fanion dans la voiture, le "06" sur la plaque et l’Aigle accroché aux clés de ma moto. On me demande souvent ce que ça signifie, et j’explique ». Si la tâche n’est pas toujours aisée, au pays où le « Football » se vit avec un casque et des épaulières, JB a remarqué un changement depuis quelques années. « L’OGC Nice est de plus en plus connu. Le passage de Mario Balotelli a clairement donné un coup de projecteur sur le club. Les amateurs de soccer connaissent également le Gym à travers Dante, qui est très respecté depuis ses années au Bayern. Et quand on fait venir le coach qui a remporté le championnat devant le Paris SG, ça leur parle ».

« Galtier plairait aux Américains »

« J’ai montré des images de ses séances d’entraînement à mes potes : Galtier a clairement tout pour plaire aux Américains, avec sa personnalité et ses réussites », témoigne celui qui attend avec impatience le prochain Nice - Marseille. « Ah, si je pouvais me téléporter pour aller à Troyes (le match en retard de la 3e journée a été délocalisé au stade de l’Aube et se jouera à huis clos le 27 octobre prochain). J'espère qu’on récupèrera nos 3 points ». D’ici là, Amine Gouiri et ses coéquipiers affronteront l'OL, une semaine après avoir chuté à Troyes (1-0). « Deux matchs à 13h, ça fait tôt », regrette Jean-Baptiste, qui se languit du duel face aux Gones. « Quand j’allais au Ray, ils étaient intouchables. Je me rappelle d’un lob mythique de Vahirua, mais c’était un exploit. Aujourd’hui, ils sont à notre portée, et ça promet un bel affrontement. Une victoire 3-1, avec des buts de Dolberg, Gouiri et Delort, ça serait pas mal, non ? »  

Un « ancêtre » nommé Marcos

« Un jour, je me balade à Tempe, une ville située dans l’agglomération de Phoenix où j’ai fait mes études. Et là, je vois une fresque sur un lycée avec inscrit "Marcos de Niza". Je me dis "tiens, tiens, l’orthographe n’est pas la bonne, mais ça sonne de chez nous". J’ai mené mes petites recherches sur internet et j'avais visé juste : Marcos aurait été le premier pionnier de Tempe. Je vois ça comme un beau clin d’oeil, s’amuse JB, qui « charrie tous (ses) potes depuis. Je leur dis :  "Mon ancêtre niçois était là avant vous tous !" »

« Frère Marc de Nice, plus connu sous son nom espagnol de Fray Marcos de Niza, est né vers 1495 à Nice (alors comté de Nice des États de Savoie) et mort le 25 mars 1558 à Mexico » est-il écrit sur Wikipédia. Sur diverses sources, l'explorateur franciscain est bel est bien reconnu comme le premier "non natif américain" à avoir posé le pied en Arizona, lui qui faisait « partie d'un groupe de Franciscains millénaristes et utopistes, qui ont essayé d'établir des sociétés idéales indiennes en Amérique. »


Fabien Hill