interview

La 5e place, le mercato, INEOS,... les réponses de Julien Fournier

Ce samedi 2 mai est un samedi médiatique pour Julien Fournier. Sollicité par Nice-Matin et RMC, le directeur de football de l’OGC Nice a livré son regard sur un certain nombre de sujets d’actualité. 


"La décision de la sagesse"

 

L’arrêt de la saison 

C’est la décision de la sagesse, il faut rappeler que c’est le gouvernement qui l’a prise. Moi, j’étais assez mal à l’aise sur une reprise aussi tôt, dès le 11 ou le 12 mai. Le foot est un sport de contact, il aurait fallu tester l’ensemble de nos joueurs et de notre staff tous les deux jours. Or, j’entends qu’il n’y a pas assez de tests en France... Pendant le confinement, un tas de gens ont fait face pour qu’on puisse continuer à vivre normalement, et on aurait dû leur expliquer qu’il n’y a pas assez de tests pour eux mais qu’il y en a pour nous ? Honnêtement, c’est la plus sage des décisions. 

L’aspect économique de la L1

On a mis en avant l’aspect économique pour continuer mais je pense qu’il y a une double analyse à avoir. Effectivement on perd les droits TV, une mauvaise nouvelle. Mais on savait qu’en reprenant le championnat, les diffuseurs n’étaient pas prêts à payer l’intégralité de la somme convenue. Deuxième point, à part le PSG, l’ensemble des clubs sont soumis au trading de joueurs. En enchaînant après une si longue période d’inactivité, dans de telles conditions, c’est-à-dire seulement avec une semaine d’entraînement collectif, il y aurait eu de la casse. Il y a également un contrat pour les droits TV pour la prochaine saison qui doit être sécurisé.

La 5e place 

Très sincèrement, je ne rentrerai pas dans des querelles. Ce calcul nous favorise, c’est vrai. Mais il n’y a aucune équipe à part le PSG qui mérite à 100% sa place. On a acquis les points sur le terrain, on mérite autant ou aussi peu que les autres. Je pense que d’éventuels recours n’auront pas d’incidence, jurisprudence Luzenac, mais les clubs peuvent espérer avoir des dommages et intérêts dans quelques années, même si le gouvernement prépare un arrêté pour entériner et sécuriser les résultats qui découlent de l’arrêt du championnat. En ce qui nous concerne, le budget avait été établi sur une 7e place.  On perd moins d’argent, certes, mais on en perd quand même, de l’ordre de plusieurs millions d’euros. C’est évidemment très lourd, mais il faut mettre ça en perspective par rapport aux entreprises, aux PME. Bien sûr, c’est une situation critique, mais il faut garder les pieds sur terre.

Le mercato 

Pour convaincre les joueurs de venir, bien sûr que l’Europe est un argument. Mais au moment où on parle, on n’est pas qualifié pour l’Europa League. On ne peut pas miser sur de l’inconnu. Cela ne change rien pour notre mercato : on a établi une liste de joueurs avant l’arrêt des championnats. Dans notre discours, on leur présente toujours un projet à moyen terme avec l’ambition d’être européen. Il faut que les joueurs soient convaincus par l’ambition du club, nos perspectives, non pas seulement par la saison d’après. Et là, notre ambition, c’est d’être dans la course aux coupes d’Europe. Ça fait partie de nos arguments, tant financièrement que sportivement. De ce que je lis Allemands, Anglais et Espagnols auront leurs droits TV, donc je ne pense pas qu’il y aura un effondrement du marché des transferts. Pour ma part, je crois plus à son ralentissement, à une baisse de 10 à 15%, à un frein psychologique des clubs au moment d’investir, à la peur du lendemain. … Le marché pourrait être en baisse pour certains joueurs. Je me trompe peut-être, car il est impossible d’avoir des certitudes. On ne s’est jamais arrêté de travailler. On a des idées très précises sur les postes à renforcer, les joueurs qu’on veut faire venir. C’est rarissime de parvenir à faire toutes les cibles mais la feuille de route est tracée. 

Le profil des recrues

On regarde toujours les qualités intrinsèques des joueurs, la dimension physique, technique, etc. Ce qui est également très important, c’est d’être le plus précis possible sur l’aspect mental. On veut faire grandir le club en terme d’esprit de compétition. Par contre, on ne transigera plus sur le travail. Le joueur qui n’a pas envie de travailler n’a plus sa place dans le projet. D’ailleurs ce n’est pas uniquement valable pour l’équipe première, mais pour nous dirigeants, le staff, le centre de formation, le médical. Après, on ne vise pas forcément des joueurs expérimentés. Youcef Atal et Hicham Boudaoui sont des compétiteurs, des gagneurs. Ce n’est pas une question d’âge.

 


"Aujourd’hui, on explique aux garçons qu’ils doivent être performants 100 matchs, au minimum, avec Nice"

 

 

Le projet 

Le projet INEOS est la continuité de notre projet. Il n’y a pas de bouleversement dans les profils ciblés, sauf qu’on a la capacité de garder nos joueurs et d’être attractif pour attirer des Claude-Maurice, Nsoki et Dolberg. On a travaillé (avec INEOS), évidemment nous avons plus de moyens, mais il y toujours des fantasmes autour de la réalité du projet dans les médias. Les années où on a eu du succès sportif, nous ne pouvions pas conserver nos éléments dans la durée. Le but du projet, ça sera de refaire ce type de trouvailles (Dalbert, Ricardo Pereira etc..) mais aussi d’avoir la capacité de le faire. Nous ne serons pas un supermarché, nous voulons construire une équipe capable de lutter pour l’Europe sur 3-4 mercatos. La grande différence avec le passé, c’est que les joueurs n’ont plus l’impression que la réussite de Nice est éphémère. Encore une fois, il n’y a pas si longtemps, on a eu du mal à garder des joueurs plus d’une saison, comme Hatem (Ben Arfa) ou Younes (Belhanda). Mario (Balotelli) avait également signé pour un an au départ. Dalbert est parti au bout d’un an. Ricardo est resté deux ans en prêt, c’était un exploit. Aujourd’hui, on explique aux garçons qu’ils doivent être performants 100 matchs, au minimum, avec Nice. On peut les retenir sans souci. On n’est plus un tremplin pour des clubs comme Aston Villa ou la Fiorentina, sans manquer de respect à ces grands clubs.

Le visage du Gym 2020

Sur le plan des résultats, c’est positif. Comme je l’ai dit, on ne mérite pas à 100% cette 5e place car on n’a pas joué 100% des matchs, mais on a avancé. Ensuite, on a restructuré le club. Cédric Varrault, Didier Digard, Manu Pirès sont de retour. Serge (Recordier) est revenu à la cellule de recrutement. Il y a eu pas mal de changements. C’était indispensable, comme notre rapprochement avec l’association. Maintenant, il faut être digne de ces responsabilités. Aujourd’hui, le Club est attractif. 

La relation avec la famille Ratcliffe 

C’est une chance incroyable, par les temps qui courent, d’avoir un actionnaire aussi fort sur le plan économique et aussi à l’écoute sur le plan humain. Il y a une semaine, on a effectué une visioconférence. Jim et Bob étaient présents. Ce sont de vrais passionnés de sport, ils s’intéressent de très près à la marche du club.

Je n’ose même pas imaginer ce qui se serait passé pour l’OGC Nice si l’actionnariat n’avait pas changé, avec notamment ce prêt « toxique » contracté sur le dos du club. Il faut donc mesurer cette chance.

Le programme des joueurs 

Ils ne sont pas encore en vacances mais il est clair qu’on va tirer les conséquences de l’arrêt des championnats. Ils auront donc des vacances, mais la reprise risque d’être plus longue que d’habitude. On ne peut pas laisser des corps inactifs pendant cinq mois. La reprise pourrait s’effectuer en deux temps. Une réflexion est menée par Patrick Vieira et son staff.

Les cas individuels 

En marge des grandes orientations collectives, Julien Fournier s’est également arrêté sur certaines situations individuelles. 

Patrick Vieira

Il sera évidemment là la saison prochaine. Il n’y a aucun débat. J’espère que Patrick pourra enfin vivre une saison normale sur le banc niçois. Sa première saison a été perturbée, en partie à cause de nous. La seconde est extraordinaire, au sens premier du terme. Quand on est content d’un entraîneur, on essaie toujours de le garder. On a envie de continuer ensemble, nous comme lui. On doit tous être meilleurs. L’ambition va augmenter, l’exigence aussi, pour tout le monde. Le plus important dans la relation coach/dirigeants, c’est le lien de confiance. Il a fallu reconstruire ce lien. Je ne peux pas parler à la place de Patrick mais je le sens profondément heureux à l’OGC Nice. Tout n’est pas qu’une question de contrat. Cela se fera naturellement.

Walter Benitez

Les discussions se poursuivent. Walter (en fin de contrat) est très attaché à l’OGC Nice et on est également très attaché à Walter. Il y a une volonté commune de trouver un accord. Cela peut paraître curieux, mais c’est la réalité. Il est normal et humain que Walter souhaite profiter de son statut de joueur libre. Il est aussi logique pour nous club d’être raisonné dans l’utilisation de notre argent. Mais c’est un dossier qui n’est pas fermé.

Malang Sarr 

C’est la vie du football (le joueur a annoncé son départ). Ce n’est ni dommage, ni une bonne nouvelle. Ce sont des choses qui arrivent. Cela n’enlèvera jamais le profond respect qu’on a pour Malang qui restera un enfant du Club toute sa vie. Nos chemins se séparent. Il a beaucoup apporté, a toujours eu un comportement de capitaine dans toutes les équipes où il est passé. C’est un bel exemple de la formation niçoise. On en est fier.