Interview

Langers à coeur ouvert

Roby Langers sera mis à l'honneur samedi par le club dans le cadre de ses 110 ans, avec une séance de dédicaces au Café des Aiglons à 15h00 puis en donnant le coup d'envoi du match contre Paris.

25 ans après, il n'a rien oublié. La chaleur d'une ville adoptant sans délai ses guerriers. L'incandescence d'un public à la passion démesurée. L'amour des fans. Le quadruplé lors du barrage retour face à Strasbourg et les buts à la pelle, souvent accompagnés « des célébrations bestiales » d'un attaquant bondissant au grillage dès qu'il prenait le dessus sur le portier adverse, en expédiant sans ménagement le cuir dans la cage. 25 ans après, Roby Langers revient à Nice avec le même plaisir et les mêmes trémolos dans la voix, preuve d'une émotion communicative qui ne s'estompe pas.

Roby, qu'est-ce que ça vous fait de revenir une nouvelle fois dans la capitale azuréenne ?
Un immense plaisir. Dans le cadre de ses 110 ans, le club invite ses anciens joueurs à une séance de dédicaces et à donner le coup d'envoi. C'est une super initiative, et je tiens à l'en remercier. Je ne pouvais pas répondre positivement lors de la rencontre face à Metz, club où j'ai également évolué, mais le Gym m'a dit « de faire comme chez moi, et de venir dès que je le pouvais. » Le match du PSG me tenait particulièrement à coeur, donc je n'ai pas hésité.

Pourquoi avoir « choisi » cette affiche ?
Parce qu'elle correspond à mon premier match en Rouge et Noir. Je me souviens très bien de cette rencontre (le 22 juillet 1989, 1e journée de D1, ndlr). J'avais inscrit un but à Joël Bats, il y avait eu plusieurs décisions contestables en notre défaveur, et le match s'était achevé dans la confusion sur le score de 3-3. C'était très chaud, comme souvent...

25 ans plus tard, après une carrière très riche et une nouvelle vie professionnelle (il est actuellement responsable sponsoring de la Loterie Nationale Luxembourgeoise, l'équivalent de la Française des Jeux), Nice reste-t-elle une destination à part ?
A chaque fois que je redescends, ça me fait quelques chose de spécial. J'ai passé des moments extraordinaires ici, des moments de rêve qui resteront gravés à vie, et remontent à la surface dès que je pose le pied dans la ville et que je me rends au stade. C'est pour cela qu'un voyage est toujours chargé en émotions.

Et ce même si votre jardin, le Ray, a cédé sa place à l'Allianz Riviera...
L'Allianz Riviera est un stade magnifique, le public niçois méritait un tel outil. Je suis déjà venu lors de l'inauguration, c'est impressionnant. Il n'y a plus la même proximité qu'au Ray, où l'on pouvait presque serrer la main à tout le monde, mais l'engouement reste très fort. Et avec deux fois plus de places, je me dis que ça doit faire encore plus de bruit.

Si vous y aviez évolué, vous n'auriez pourtant pas pu grimper au grillage pour célébrer vos buts, comme vous en aviez l'habitude...
C'est sûr, il n'y en a pas. Cependant, je dois avouer que ça m'aurait bien plu de fouler cette pelouse, et je pense que c'est le cas de nombreux anciens. Mais il n'y a pas de regrets, j'aimais beaucoup le Ray, et j'ai réservé ma dernière montée de grillage pour le dernier match qui s'y est tenu. C'est très bien ainsi.

Justement, pouvez-vous revenir sur cette « Der » mémorable ?
Quelle ambiance, quelle journée ! Cela fait toujours plaisir de croiser des gars que l'on ne voit plus depuis 10 ou 15 ans, même si on pense évidemment aux absents, et notamment à ceux qui nous ont quittés comme Jules Bocandé. Avec le recul, je me dis que j'étais un bon joueur, mais ce soir-là, il y en avait de très grands à mes côtés, ce qui est venu rappeler que le club a compté d'immenses talents dans son histoire.

Une histoire dont vous faites partie intégrante en tant que membre du « 11 de légende ».
Le moment où j'ai appris cette nouvelle, j'ai eu de grands frissons, tout en ressentant une immense fierté. Je n'ai passé que deux saisons au Gym, et comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire, je serais encore resté à Nice 4 ou 5 ans si le club n'avait pas connu de difficultés financières. La DNCG nous avait relégués administrativement, et j'ai été contraint de partir. Sinon, je n'aurais pas bougé pendant un bon moment.

Comment expliquez-vous cet amour que vous entretenez toujours avec le club, les supporters et la ville ?
Il y a toujours une plus grande proximité avec les attaquants qu'avec les défenseurs, même si d'illustres arrières sont passés à Nice. J'avais aussi l'habitude d'être très proche des supporters, notamment après mes buts, il y avait une vraie communion avec le public : je pense que ça a bien aidé à mon acclimatation. Et puis il y a aussi ces 4 buts contre Strasbourg, que même les plus jeunes peuvent encore visionner de partout aujourd'hui. Le lien était très fort et ne s'est jamais distendu, Nice ne m'a pas oublié, mais je garde de mon côté la ville et le club dans mon coeur.

Vous vous attendez donc bien évidemment à replonger de nouveau dans ce barrage retour (remporté 6-0), où votre quadruplé avait en partie permis aux Aiglons de rester en L1 ?
Evidemment. On me parlera toute ma vie de cette rencontre, et c'est bien normal. Pour ma part, les souvenirs demeurent encore très vifs. Le tour d'honneur des Strasbourgeois à l'aller alors qu'ils pensaient avoir fait le plus dur, ce qu'on s'est dit avec les joueurs dans les vestiaires, Carlos Bianchi – qui était phénoménal – surexcité sur le banc, le monde autour et dans le stade qui a fait qu'on avait eu du mal à entrer au Ray... On en parle à chaque fois, et c'est toujours aussi agréable.

Vous avez également décidé d'offrir le maillot de ce match au club, pour qu'il l'expose au Café des Aiglons.
Exactement, le maillot de la première période et, plus largement, le maillot de ma vie. Celui du match le plus symbolique auquel j'ai pu participer. Je le conservais jusqu'à présent sous vitre, dans mon bureau de la Loterie Nationale. Je suis désormais heureux qu'il puisse faire partie du musée d'un club qui a tant fait pour moi, il sera entre de bonnes mains.

Quel regard portez-vous sur l'équipe actuelle ?
Elle a fait un bon début de saison, avant de connaître un passage à vide et de se reprendre dernièrement. C'est une équipe peuplée de jeunes joueurs, et j'aime bien le petit Bosetti, qui est en plus un local, Bauthéac ou Eysseric. La victoire à Reims a fait du bien, je pense que ça devrait bien se passer pour le maintien. J'ai simplement eu l'occasion d'assister à la rencontre à Metz, et ça m'avait bien plu. Je trouve globalement que le travail de Claude Puel est très bon, surtout que c'est toujours difficile quand il n'y a pas un énorme budget.

Une situation opposée à celle du PSG...
Quand je pense à Paris, je pense directement à M. Borelli, qui incarne pour moi ce club. J'avais d'ailleurs failli rejoindre la capitale quand j'étais joueur, mais ça ne s'était finalement pas fait. C'est une grosse écurie de la L1, et il faut bien avouer que la venue de nouveaux investisseurs lui a donné une dimension européenne encore plus grande. Ils ont un quart de finale de Ligue des Champions à disputer face à Barcelone, et je suis certain qu'ils sont capables d'éliminer cet adversaire et de poursuivre leur chemin, ce qui serait très bon pour tout le foot français.

Pensez-vous que ça reste jouable samedi pour le Gym ?
Oui, tout est jouable. Nice a perdu des points un peu bêtement cette saison, mais a aussi montré qu'il pouvait battre les grosses cylindrées du championnat, Lyon, Monaco, Marseille... alors pourquoi pas le PSG ? Une victoire serait magnifique, mais même un match nul, je signe de suite. Surtout si ça se finit sur un spectaculaire 3-3, comme à l'époque.

Propos recueillis par Constantin Djivas