Interview

Dyon : « Dès la reprise, on va mettre les baskets »

Onze ans après son départ de l’OGC Nice, Nicolas Dyon a signé son retour au club en cette fin d’année 2020. Préparateur physique sous l’ère Antonetti (2005-2009), il fait désormais partie du staff d’Adrian Ursea. Homme d’expérience (43 ans), également passé par Saint-Etienne, Rennes, Lugano et les Grasshoppers Zurich, il n’a pas tardé à se mettre au travail. Avec une contrainte – « le temps » – et un plan d’action bien précis.

Nicolas, tu es entré en fonction le 4 décembre : quelles ont été tes premières missions ?
En premier lieu, je devais faire connaissance avec les joueurs. Je connaissais une bonne partie du staff technique et 70 % du staff médical, ce qui permet de gagner du temps. J’ai dû rapidement m’imprégner du contexte, analyser la situation, prendre les infos, les différentes blessures des joueurs, leurs origines, les antécédents. Bref, il fallait faire un audit complet. Pour le reste, il y a un peu de frustration, car à part sur certains détails, je n’ai pas pu intervenir en profondeur car on a joué tous les 3 jours. 


Quels sont justement les détails que tu as changés ?
Des règles au quotidien. Le 1er jour, j’ai d’abord dit aux joueurs que je ne parlerai jamais mal du passé. Dans le foot, il y autant de méthodes que de staffs. Cette précision faite, le contenu de ma préparation est diamétralement à l’opposé de ce qui se faisait ici avant mon retour. Pas parce que je détiens la vérité, mais parce que nous avons une culture différente, donc moi j’ai une méthode française. Après, dans notre métier, il faut avoir beaucoup d’humilité et ne jamais dire : « Ce que je fais marche ». Une préparation peut fonctionner une année avec un groupe mais pas celle d’après. Depuis mon arrivée, j’essaie d’abord de faire comprendre aux joueurs ce qu’ils font. Ils doivent capter le pourquoi des exercices, leur finalité. Pour que mon message passe, il faut qu’il soit clair pour tout le monde. Le relationnel avec les joueurs est capital, tout comme l’exigence. Ce sont les deux clefs de notre métier. Autre chose sur laquelle nous travaillons beaucoup avec le staff médical : on doit diminuer les blessures. C’est indispensable. Le patrimoine d’un club, c’est la santé des joueurs. Les voir en tribunes, c’est un drame. Il faut absolument qu’on ait moins de blessés. C’est notre responsabilité.

Quel est le programme de la trêve ?
Les joueurs auront 4 jours de repos complet, puis une séance à faire chez eux. Au 6ème jour, on sera déjà sur le terrain. Même si je suis assez moderne dans mon approche, on va revenir à des choses traditionnelles. Une saison, c’est comme une maison. Avant toute chose, il faut construire les fondations : donc les joueurs vont faire du foncier pour créer une base « d’endurance aérobie ». Dès la reprise, on va mettre les baskets et retourner à Vaugrenier. Je ferai de la préparation intégrée plus tard, d’abord, baskets et course ! Des journées avec 3 entraînements vont aussi être planifiées. Pour moi, c’est un drame de ne pas avoir été là lors de la préparation estivale et de ne pas avoir de temps cet hiver, car après les joueurs se retrouvent dans « une machine à laver » avec des matchs qui s’enchaînent à un rythme effréné. Mais cette saison est particulière et après ce que nous venons de vivre, nous n’allons pas pinailler parce que nous manquons de temps. Nous nous adaptons.


Ta méthode a-t-elle évolué avec les années ?
Je fais beaucoup plus d’exercices de prévention qu’au début de ma carrière, histoire d’éviter au maximum les blessures. Plus ça avance, plus la méthode évolue, c’est normal. En 2002, il n’y avait pas de GPS. J’ai aussi co-créé le module RPE sur la plateforme My Coach Pro pour collecter beaucoup d’informations sur l’état des joueurs. Quand je n’étais pas en poste, j’ai beaucoup voyagé pour découvrir d’autres sports et d’autres cultures. A Zurich, par exemple, je me suis inspiré des Allemands. Globalement, pour une même charge de travail, ils fournissent plus d’efforts à haute intensité. Après, même si j’observe ce qui se fait ailleurs, je pense qu’il ne faut pas dénigrer le savoir-faire français. Chez nous, on travaille bien, même si la finalité, ce sont les résultats. Nous pouvons parler de tout, tout le temps, au final, il n’y a que ça qui compte et qui valide - ou pas - ton travail.

Comment s’est déroulé ton retour au club ?
Depuis qu’on est rentrés de Rennes en 2013, je suis installé à Cagnes-sur-mer avec ma famille. Quand je travaillais en Suisse, je revenais le week-end. Là, je suis rentré depuis mars en raison de la crise du Covid. Je me suis engagé auprès de ma famille à couper un peu pour rester avec eux, avec l’idée d’étudier de nouvelles pistes professionnelles à partir de janvier 2021. Et puis j’ai rencontré les dirigeants de l’OGC Nice… Je connaissais beaucoup de monde au club, mais je ne les connaissais pas encore. Nous avons directement parlé de la performance dans le foot et puis ça s’est fait naturellement. Il n’y avait rien de planifié.

Le Gym d’aujourd’hui est-il différent de celui que tu as connu ?
Oui et non. Oui car c’est un retour à la maison et la maison a changé (sourire). Le club s’est vraiment professionnalisé, notamment au niveau des installations. Et non parce que même s’il y a de nouvelles personnes, j’ai retrouvé beaucoup de visages connus. Donc le côté familial est toujours là.

Quels souvenirs gardes-tu de tes années niçoises ?
C’était une superbe expérience (de 2005 à 2009). Le Ray, le groupe, la finale de Coupe de la Ligue, les saisons où on a terminé dans les 8 premiers. Je me suis régalé. Au moment de suivre Fred Antonetti à Rennes, j’étais heureux mais j’avais quand même le coeur serré.


Tu as eu le coach Antonetti avant de revenir ?
Bien sûr ! Nos chemins se sont séparés après Rennes car il avait besoin de couper, alors que je devais continuer à travailler, mais nous sommes toujours en contact. Fred, c’est mon deuxième père, je lui dois tout dans le foot. Des rencontres comme ça, comme celle avec Jean-Marie De Zerbi (adjoint de Fred Antonetti, ndlr), on n’en fait pas souvent.

Le profil des joueurs niçois n’est pas le même que celui que tu as connu à l’époque...
Ça c’est sûr ! J’ai été très surpris quand je suis arrivé au club car en 17 ans de L1, je n’avais jamais vu un groupe aussi jeune. En plus Dante et Lees-Melou étaient blessés. Ce n’est pas pour me déplaire. Les joueurs sont à l’écoute, travaillent, à nous d’adapter notre management et notre pédagogie. Le groupe doit savoir que je suis là pour l’accompagner et le guider. Pour conclure, je tiens à remercier tous les gens du club, car j’ai été très bien accueilli par tout le monde, des administratifs aux joueurs en passant par le staff.

C.D.