Covid-19

Jean-Pierre Rivère : « Le moment de bousculer les choses »

Du recul et de la hauteur. Alors que les craintes avancées ces derniers jours par les médecins, les joueurs ainsi que les entraineurs se multiplient devant l’hypothèse d’une reprise précipitée, le président de l’OGC Nice en appelle au bon sens. « Dans la difficulté, il ne faut pas hésiter à revoir les schémas, à se poser les bonnes questions. Il n'est jamais bon d'agir dans l'urgence », insiste Jean-Pierre Rivère.

Parce que « la priorité doit être donnée au sanitaire ». Et parce que la visibilité n’est aujourd’hui pas suffisante sur l’évolution de la pandémie et les conditions de reprise, le président du Gym considère qu’une modification en profondeur du calendrier mérite d’être étudiée. « Petit à petit, le Covid-19 nous pousse à ce scénario », répète-t-il ce lundi soir, un mois après en avoir lancé l’idée.

REPRISE À LA FIN DE L’ÉTÉ

Alors que la Ligue a rappelé dans la journée qu’un des plans prévoyait une reprise de la saison 2019/2020 le 17 juin 2020 et un démarrage du championnat 2020/2021 le 23 août, le Président de l’OGC Nice « trouve que l'exercice qu'on est en train de nous demander de faire n'est pas réalisable. Je ne parle pas d'un arrêt, les enjeux sont importants. Mais reprenons tranquillement ».

Au vrai, il n’a pas varié depuis sa première prise de position. Mais les semaines qui viennent de s’écouler donnent aujourd’hui encore plus de poids à sa proposition. En ligne de mire : une reprise des entrainements début juillet avant de reprendre la saison 2019-20 « au mieux mi-août, voire début septembre ». Puis de « riper toutes les dates ». Le mercato se ferait alors cet hiver et les saisons suivraient ensuite le rythme de l’année civile : « Les contrats qui se terminent au 30 juin, il faut les riper jusqu'à la fin de l'année. Plutôt que d'avoir un mercato au 1er juillet, vous finissez le Championnat fin octobre - début novembre et le mercato se décale à ce moment-là. En 2021, vous commencez le Championnat fin janvier environ, et au mois de juin vous avez un Euro avec des joueurs en pleine condition physique contrairement à d'habitude. Vous reprenez votre Championnat après, et vous le finissez  entre fin octobre et novembre. En 2022, vous reprenez en février, avec en fin d'année la Coupe du monde au Qatar ».

Dans ce schéma, il ne serait plus nécessaire d’obliger les joueurs à terminer le championnat au pas de charge cet été, avec un match tous les trois jours, comme le redoutent les entraineurs avec les risques inhérents de blessures.

« Je ne connais pas un seul président qui a envie de faire encourir le moindre risque à l’un de ses joueurs », insiste-t-il. « D’autre part, même si d’aventure nous étions encore contraints de jouer à huis clos en septembre, nous aurions alors le temps de préparer cela avec toutes les sécurités sanitaires ».

Autre « avantage majeur » de ce calendrier revisité : arrêter de jouer au football « dans les pires mois » (en décembre et janvier, ndlr) « sur des pelouses dégradées et dans des conditions climatiques difficiles pour les spectateurs », énumère-t-il.

« APPORTER DU TEMPS »

Les obstacles sont connus. La nécessaire harmonisation internationale. La question de la trésorerie des clubs, aussi. Jean-Pierre Rivère en a bien conscience, mais « aujourd'hui, la priorité c'est le sanitaire. La reprise un peu précipitée qu'on souhaite faire, je trouve que ça n'a pas une vraie cohérence. On fait prendre des risques alors que personne ne veut en prendre. J'aimerais qu'il y ait une réflexion à l'échelle européenne sur ce scénario. Il pourrait apporter du temps par rapport à ces événements qu'on ne maîtrise pas beaucoup ».

Une position isolée ? « Je ne sors pas en solitaire sur ce sujet », répond-il, alors que d’autres dirigeants, à l’image de Jean-Michel Aulas ce lundi, se sont ralliés publiquement à sa position. « On échange quotidiennement entre nous. Il y a deux jours, Jean-Michel Aulas me disait qu’il n’y avait que très peu de chances que cette idée aille au bout, entre 0 et 5% de chances selon lui. Il a raison, parce que ce n'est pas simple à mettre en oeuvre. Mais dans la vie, quand il y a au moins 1% de chances, il faut tenter. ».

Jean-Pierre Rivère confie aussi avoir échangé avec Noël Le Graët : « Il y a un mois, j'ai appelé le président de la FFF pour lui soumettre ma proposition. Il m'avait alors répondu qu’il trouvait l’idée bonne mais qu’elle arrivait trop tôt. Je n'étais pas audible. On s'est rappelé récemment et il m'a dit : "Président, je partage cette idée et je pense que c'est la bonne solution aujourd'hui."

Et le Président du Gym de conclure : « Nous partageons le même souhait : que notre football continue. Dans les mêmes conditions ? ou un peu différemment ? Dans ce que je propose, il y a un surcoût pour les clubs, oui, mais c'est secondaire. Si on a la sagesse de regarder la situation, de se mettre tous autour d'une table, on peut résoudre d'abord le problème sanitaire avant le problème financier. Pensons aux acteurs du football, à nos supporters, à nos partenaires, aux diffuseurs,… C’est le moment ou jamais de bousculer un peu les choses et de faire en sorte que tous ensemble, on trouve la meilleure solution pour préserver des vies, préserver des emplois et améliorer notre football ».