Interview

Formation : bilan et perspectives

Ancien entraîneur adjoint, Alain Wathelet a dirigé toutes les catégories de jeunes, de la pré-formation à l’équipe réserve, avant de prendre les rênes du centre en 2014. A l’aube de sa 20e saison à l’OGC Nice, le directeur de la formation niçoise dresse le bilan de l’exercice écoulé, et fixe le cap.

Quel regard portez-vous sur la saison 2017-18 ?
Elle a été correcte, dans l’ensemble. On développe du beau jeu, mais nous devons être plus compétiteurs, et retrouver cet esprit niçois de gagne. Jean-Pierre Rivère et Julien Fournier l’ont évoqué au niveau des pros. On a fait le même constat chez les jeunes : il faut retrouver plus de « gnac », de détermination. C’est ce qui nous manque aujourd'hui pour nous hisser aux 2 premières places en championnat ou aller plus loin en Gambardella.

Lors de son intronisation, Patrick Vieira a réaffirmé l’importance du projet « jeune »…
Oui, il veut connaitre tout le monde, voir l'équipe réserve, s’imprégner du club. C’est positif. Le rêve, c’est qu’un jour l'équipe première soit composée à 50% de joueurs formés au Gym. Cet objectif doit animer tout le monde dans le club, des formateurs aux pros. Nous devons être ambitieux.

« Gautier, Olivier, Saïd et Mouez vont revenir changés »

Plusieurs joueurs formés au club ont été prêtés en L2. Comment jugez-vous leur saison ?
Ils ont pu enchaîner les matchs et ont été très forts. Gautier (Lloris, Gazélec Ajaccio), Olivier (Boscagli, Nîmes) Saïd et Mouez (Benrahma et Hassen, Châteauroux) ont franchi un cap. Ils ont fait de gros progrès et vont revenir changés. Olivier est international Espoirs, Mouez va faire la Coupe du Monde, ça signifie quelque chose.

D’ailleurs, de plus en plus de jeunes Aiglons sont appelés en sélection…
Oui, ça augmente régulièrement et ça prouve notre progression. Quand on était le 30e centre de France, on avait un sélectionné de temps en temps. Aujourd’hui, on est classé 13e, et on en a 1 voire 2 dans chaque catégorie. Quand on voit Romain Perraud dans l’équipe-type du tournoi de Toulon, c’est un beau signal.

« Tout est tourné vers la performance »

La saison 2017-18 a aussi été marquée par l’arrivée dans le nouveau centre. En quoi vos conditions de travail ont-elles évolué ?
En tout, c’est un autre monde. Les échanges sont facilités entre les différentes catégories, avec un open space pour les formateurs, des vestiaires juxtaposés, etc. L’internat offre des conditions idéales pour les jeunes. Mais le plus marquant, c’est la partie « médicale », avec la salle de muscu, les espaces pour les kinés, les bains chaud et froid pour la récupération. Tout est tourné vers la performance et cela nous permet de nous focaliser sur notre job.

Sur le plan sportif, quelles sont les retombées d’un tel outil ? 
Il favorise le recrutement de nouveaux jeunes. Les parents savent qu’ils arrivent dans un club sérieux où leur fils sera bien encadré. Ça met aussi une forme de pression supplémentaire aux jeunes qui étaient déjà là : ils se disent qu’ils ne sont plus dans le même club qu’avant. Au niveau des infrastructures, on a rejoint les clubs de haut de tableau. Nous devons hisser la formation à ce niveau là aussi. Il faut former mieux et plus.

Votre staff sportif va évoluer. Pouvez-vous nous détailler ces changements ?
En N2, Laurent Bonadei poursuit l’aventure. Ses 3 saisons sont une réussite. Il a bien compris son rôle de relais entre le centre et les pros. Il va désormais prendre plus d’ampleur, puisque nous allons programmer ensemble les cycles techniques du centre. Chaque semaine, Laurent va définir des thèmes de travail, et le contenu des séances pour les 3 niveaux (N2, U19, U17). L’objectif, c’est qu’on joue de la même façon tout au long du processus. 

Quels sont les thèmes de travail ?
Il y a des thèmes classiques, comme notamment la possession ou les attaques placées face à un bloc bas. Et puis il y a ceux qui résultent de carences que l’on a identifiées. Cette saison, on a notamment insisté sur le jeu de tête, et sur la défense dans le dos, car on évolue haut sur le terrain. En plus de ces thèmes communs, on ira plus loin cette saison, avec des séances identiques dans toutes les catégories. On jugera les résultats à la fin.

« Emerse monte d’un cran »

Emerse Fae prend la suite de Thierry Malaspina, en U19.
Oui, Thierry a fait du bon travail, auprès des gardiens d’abord, avant de devenir un bon éducateur. Je lui souhaite le meilleur, car il nous quitte pour un beau challenge (entraîneur des gardiens du RC Lens, ndlr). Quant à Emerse, il monte d’un cran, après avoir dirigé les U17 pendant 3 saisons. Il est encore en apprentissage et ça va lui permettre de voir autre chose. Entraîner, il sait faire. C’est sur le plan humain que ça va changer, car les ados ne sont plus les mêmes à 16 ans qu’à 18 ou 19. Il va développer de nouvelles compétences de manager, et devenir un formateur confirmé. Il est très investi, et s’est accroché depuis ses débuts, car il a commencé très jeune (28 ans). Sans ses problèmes, il aurait encore pu jouer aujourd’hui !

Son successeur en U17 se nomme Patrick Cordoba. Pouvez-vous nous le présenter ?
C’est un formateur confirmé, qui a dirigé le centre d’Istres, et entraîné les U19 de Nîmes et d’Ajaccio, ou encore les U17 de Grenoble. Je l’ai notamment affronté en 2004, avec Lloris dans un camp, et Giroud de l’autre ! Son expérience devra nous permettre de réduire au maximum le temps d’adaptation des jeunes qui arrivent en U17, car c’est un moment charnière. Concernant sa philosophie de jeu, je n’ai aucun doute : ses équipes jouent au ballon, comme nous. Et, c’est un gars du Sud, ce qui favorisera son intégration, et nous apportera aussi dans le recrutement, car il connait beaucoup de monde dans le bassin méditerranéen et sa périphérie.

« Ouvrir l’esprit des jeunes »

Hors foot, l’encadrement des jeunes a évolué, avec l’arrivée d’un animateur de vie. Quel est son rôle ?
Le message du président est qu’il est important de développer des hommes avant de former des footballeurs. C’est aussi ce qu’on dit aux parents, et on y tient. On essaie donc d’ouvrir l’esprit de nos jeunes, dès que leur emploi du temps le permet. Dans ce cadre, un animateur, Geoffroy Boudon, a été engagé. Il programme des tournois de ping-pong, de pétanque, mais aussi des sorties comme la visite de la caserne de pompiers, les matchs de Hockey, le cinéma, le théâtre, la plage, les repas… Et il y a aussi tout un travail avec le service com’, qui a permis d’impliquer les jeunes dans de nombreuses actions citoyennes. Ça permet de les faire grandir.

Le bac va bientôt débuter, vous n’êtes pas trop stressé ?
Personnellement, pas du tout. Par contre, les joueurs… (Rires). Depuis des années le pourcentage de réussite est très bon, donc il n’y a pas trop d’inquiétude. Le bac, c’est une clé qui permet d’ouvrir d’autres portes, comme l’entrée en STAPS par exemple. A côté, on a mis en place d’autres filières comme le nouveau BMF (Brevet de Moniteur de Football) ou le BEPEJEPS (animateur sportif) pour ceux qui veulent rester dans le foot. C’est important de préparer leur avenir, car tous ne finiront pas pro’.

Propos recueillis par Fabien Hill